Friedrich Hegel la voyait « européenne », Elisée Reclus la considérait « latine », et Charles-André Julien l’affublait de « blanche »… Et les touristes étrangers ?
A en croire les chiffres du secteur avancés par la Banque Mondiale, il ne serait pas fantaisiste de la qualifier de « touristique » ! L’Afrique du Nord, partie la plus septentrionale du continent, maintient le cap et continue d’attirer en dépit d’un contexte politique parfois tendu. Pour un premier voyage en Afrique, des pays comme le Maroc, la Tunisie ou l’Egypte semblent les plus à même à accueillir une première expérience touristique. Il faut dire que la région a été choyée par Dame Nature : côtes interminables, massifs montagneux vertigineux, étendues désertiques impressionnantes… Le climat chaud et sec pendant une grande partie de l’année ainsi que la proximité géographique avec le Vieux Continent sont les autres atouts de taille de l’Afrique du Nord.
D’un autre côté, les raisons du succès de cette destination ne sauraient se limiter à ce profil naturel de premier choix. En effet, avec un héritage culturel hétéroclite, mêlant des influences berbères, arabes, africaines et européennes, les pays de l’Afrique du Nord, et encore plus ceux du petit Maghreb (Maroc, Algérie et Tunisie), proposent au visiteur une expérience de vie peu commune, le plus souvent couplée à des infrastructures au moins correctes et à un savoir-faire toujours en progression. Si la région compte trois champions du tourisme mondial, elle compte aussi des contrées complètement délaissées en dépit d’un potentiel avéré. Ainsi, la Mauritanie, la Libye, le Soudan et à un degré moindre, l’Algérie, semblent déconnectés des circuits touristiques traditionnels et n’arrivent pas à se mettre au diapason du Maroc, de la Tunisie et de l’Egypte qui accueillent conjointement quelque 26 millions de touristes annuellement, contre moins de 3 millions cumulés par le reste des pays de l’Afrique du Nord.
Avec plus de 213 millions d’habitants, l’Afrique du Nord est un grand foyer démographique, marqué par l’hégémonie des moins de 30 ans dans une cartographie d’âge en pyramide régulière. Les conceptions diffèrent sur cette partie de la région MENA ; nous retiendrons la définition de l’ONU, à laquelle nous grefferons la Mauritanie en tant que pays du grand Maghreb. Nous explorerons donc, en plus de la Mauritanie, le Maroc, l’Algérie, la Tunisie, la Libye, l’Egypte et le Soudan. Le Sahara occidental, qui fait l’objet d’une double revendication par le Maroc et le Front Polisario, sera traité dans la partie relative au Maroc non pas par un quelconque parti pris politique, mais par commodité, dans la mesure où le Royaume administre 80% de ce territoire non autonome.
Découvrir le Maroc
Pour une première escapade en Afrique mais aussi dans la région MENA, il est difficile de faire un meilleur choix de destination tant le Royaume collectionne les bons points géographiques, culturels et infrastructurels.
A moins de 20 kilomètres de l’Espagne et à moins de trois heures d’avion de la France, le Maroc a su capitaliser sur sa position géographique stratégique à proximité du Vieux Continent. De par sa localisation à l’extrême nord-ouest de l’Afrique, le Maroc est l’un des rare pays à posséder deux façades maritimes : une sur l’océan Atlantique à l’ouest, l’autre sur la mer Méditerranée au nord.
En été, un séjour au Maroc sera l’occasion de profiter de côtes longues de quelque 2934 km, dont 430 sur la rive méditerranéenne (Tétouan, Tanger, Al Hoceima), de Sebta jusqu’à la frontière avec l’Algérie, 82 km donnent sur le détroit de Gibraltar, et plus de 2400 km constituent la façade atlantique du Maroc qui s’étend du Cap Spartel jusqu’à la frontière avec la Mauritanie, en tenant compte du fait que le Royaume administre de facto les côtes du Sahara Occidental. L’omniprésence maritime favorise le pratique des sports nautiques, avec des spots mondialement connus pour le surf, comme Imsouane, Taghazout (à 18 km d’Agadir) ou encore Mirleft, mais aussi pour le kitesurf (Dakhla) et le jet ski (Agadir et Tanger).
L’autre atout naturel de taille réside dans les chaînes montagneuses de l’Atlas et du Rif qui offrent des possibilités infinies de randonnées et de nuits à la belle étoile. Les hauteurs majestueuses sont ponctuées de cascades et de grottes mystérieuses qui ne manqueront pas d’émerveiller les aventuriers en herbe: les Grottes d’Hercule de Tanger sont d’ailleurs incontournables.
Le Maroc, ce sont aussi des villes impériales, dont le charme multi-centenaire a été savamment maintenu. Le théâtre de rue de Djemaa el-Fna de Marrakech, inscrit au patrimoine de l’Unesco, vous offre une expérience de vie indescriptible, au rythme des conteurs d’histoires, des troubadours et autres artistes de rue. La médina de Fès est également un véritable labyrinthe qui vous replongera au cœur du Maroc d’antan. Des vacances au Maroc seront également l’occasion d’emprunter le chemin des casbahs dans la vallée du Drâa ou encore de déguster un thé à la menthe dans les villages berbères du Haut Atlas.
Découvrir l’Algérie
Depuis l’indépendance du Soudan du Sud en 2011, l’Algérie a hérité du statut du plus vaste Etat d’Afrique, du monde arabe et du bassin méditerranéen. Il est frontalier de la Tunisie, de la Libye, du Niger, du Mali, de la Mauritanie, du Sahara Occidental et du Maroc.
En dépit d’un profil naturel plutôt attirant, mêlant les plages méditerranéennes aux étendues désertiques du Sud, l’Algérie peine à trouver sa place dans la cartographie touristique mondiale, et n’arrive toujours pas à se mettre au diapason de ses voisins qu’elle dépasse pourtant largement en termes de PIB.
En effet, le pays a accueilli en 2015 moins de 2,4 millions de touristes, soit moins que des pays comme Andorre, le Laos ou encore l’Estonie. Pourtant, l’Algérie a plusieurs cordes à son arc. Des montagnes enneigées de Kabylie au Tadart Rouge à Djanet, du massif de l’Ouarsenis de Tissemsilt aux plages paradisiaques de Béjaïa, des étendues désertiques du Grand Sud aux terrasses des grands cafés algérois, votre séjour en Algérie ne sera perturbé que par des infrastructures qui accusent parfois une certaine obsolescence. Aussi, il n’est pas rare de voir des établissements hôteliers pourtant rustiques afficher des prix fantaisistes.
Si la façade méditerranéenne est un atout non négligeable, elle n’est pas la principale attraction du pays dans la mesure où tous les pays de l’Afrique du Nord sont solidement dotés d’étendue maritime. Des vacances en Algérie seront plutôt motivées par les treks en plein dans le désert. Ainsi, la région de Tamanrasset séduit de plus en plus de touristes par les paysages de roche et de rocaille du Hoggar, mais aussi par les dunes sahariennes du Rassili et les habitations cubiques qui jonchent les rues ensablées de la ville. L’oasis de Timimoun et le Grand Erg occidental sont les autres incontournables naturels de l’Algérie.
Les centres urbains ne sont pas dénués de tout intérêt, et un détour par la médina d’Alger, les mosquées de Tlemcen et les ruines romaines de Timgad seront également à prévoir.
Découvrir la Tunisie
Avec un peu plus de 6 millions d’arrivées par an pendant la période post-révolution, la Tunisie est un champion régional du tourisme en dépit d’un climat social quelque peu tendu. Le pays présente un profil géographique plutôt comparable à celui de l’Algérie et du Maroc, avec toutefois une superficie réduite et une population proportionnellement moins importante.
Berceau de la civilisation carthaginoise, la Tunisie est souvent considérée comme étant l’un des rares foyers laïques du monde arabe. Profondément ancré dans l’économie du pays, le tourisme est également l’une de ses principales sources de devises. Le secteur est porté par les 1 300 km de côtes sablonneuses, par le climat méditerranéen mais aussi par un patrimoine historico-culturel exceptionnel matérialisé par les huit sites inscrits au patrimoine mondial de l’Unesco. La destination est également particulièrement compétitive et propose des prestations correctes à petit prix. Un séjour en Tunisie prendra des allures différentes selon les goûts et la saison.
Le littoral oriental est particulièrement prisé par les visiteurs étrangers, si bien que Djerba, Sousse, Hammamet et Sfax cumulent à elles seules 95% des lits.
La Tunisie possède de nombreux ports de plaisance qui tirent profit de la pénurie des places de la rive européenne de la Méditerranée. Citons à ce titre les ports de Tabarka, de Bizerte, de Sidi bou Said et de la Goulette-Nord.
Si des destinations comme Hammamet, Djerba ou Tabarka sont plutôt bondés pendant la haute saison, vous serez étonné du calme enchanteur de Melloula et ses criques à la frontière algérienne. Enfin, ne manquez pas les nombreux vestiges romains qui continuent de marquer la belle Carthage. Le Musée du Bardo abrite d’ailleurs une des plus belles collections de mosaïques romanes au monde.
Découvrir la Libye
Dire que la Libye n’est pas un pays touristique est un euphémisme. En proie à une grave crise sécuritaire depuis la chute du régime de Kadhafi, le pays a depuis perdu le peu d’attractivité qu’il s’était forgé aux yeux des touristes étrangers.
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, la Libye ne se limite pas une étendue désertique hostile à la présence humaine. Des pôles urbains comme Tripoli ou Benghazi peuvent parfois se montrer beaucoup plus animés que les plus grandes métropoles africaines, et les 1 770 km de côtes méditerranéennes n’ont rien à envier à celles de la Tunisie voisine. Le désert libyen est ponctué de paysages spectaculaires malgré une chaleur étouffante et un profil sécuritaire incertain. Les escapades en solo y sont d’ailleurs fortement déconseillées. Bien qu’elles soient largement méconnues, les villes antiques libyennes sont particulièrement bien conservées et proposent une belle alternative au tourisme balnéaire et saharien.
Dans la ligne réservée à la Libye, la Banque Mondiale affiche la mention « aucune donnée » devant l’attribut « nombre d’arrivées » durant les dernières années. Le dernier chiffre officiel remonte à 2003 et fait état de 300 000 touristes accueillis ; un chiffre a dû être divisé par 1 000 au regard de l’instabilité chronique du pays pendant la période post-révolution. Quoi qu’il en soit, un séjour en Libye sera l’occasion de s’engouffrer dans le labyrinthe des ruelles de la médina de Tripoli, de flâner à Leptis Magna, fleuron de l’architecture romaine, ou encore de se ressourcer à l’oasis peu fréquentée d’Al-Jaghbub, à proximité de Tobrouk dans la Cyrénaïque.
Découvrir l’Egypte
Bien qu’il se soit peu à peu invité dans les gros titres de l’information depuis la fin des années 2000, le pays des Pharaons reste une destination mondiale phare pour les aficionados de l’histoire des civilisations, mais pas seulement.
L’Egypte, 15e foyer démographique mondial et premier dans le monde arabe avec plus de 90 millions d’habitants, fait partie du club très fermé des pays intrinsèquement touristiques. Si la destination a pâti de certains contretemps sécuritaires et d’une série inquiétante de crashs aériens, elle reste une valeur sûre sur l’échiquier du tourisme mondial avec un peu plus de 9,6 millions de touristes annuellement, soit le deuxième meilleur score en Afrique derrière le Maroc et devant l’Afrique du Sud. Il faut dire que le pays possède un grand intérêt historique et culturel, qui vient se greffer à des paysages hauts en couleur marquant la transition entre l’Afrique et l’Asie par le Canal de Suez.
L’Egypte est une contrée curieuse fondée sur une dualité entre un glorieux passé et un avenir incertain, une splendeur architecturale et une misère sociale, un conservatisme enracinée et un modernisme hésitant… Berceau des hiéroglyphes, l’Egypte des Pharaons a concouru à faire sortir l’espèce humaine de la Préhistoire, pour lui léguer un patrimoine culturel qui s’inscrit aujourd’hui dans la culture populaire mondiale.
Un séjour en Egypte sera l’occasion de suivre les traces de Néfertiti, Cléopâtre, Toutankhamon et Ramsès II, d’explorer les pyramides de Gizeh, de faire un tour à Louxor ou à Alexandrie, ou encore d’arpenter les rues du Caire sous le chant du muézin. Les amateurs de plongée jetteront leur dévolu sur les spots de la Mer rouge, où l’on pourra notamment admirer l’épave du Thistlegorm découverte par le commandant Cousteau.
Découvrir le Soudan
Avec moins de 700 000 touristes par an, le Soudan est résolument en dehors des circuits touristiques habituels.
S’il a récemment souffert de la scission de sa moitié sud avec l’indépendance du Soudan du Sud, ce sont surtout les 30 années de conflits armés particulièrement violents qui ont terni la réputation de ce pays traversé par le Nil. Aujourd’hui, le pays semble sur la bonne voie et rompt peu à peu avec son isolement. Il faut dire que le pays n’est pas dénué d’un certain charme inhérent au fait qu’il constitue une curieuse transition entre l’Afrique du Nord et l’Afrique subsaharienne. D’abord terre d’aventures, le Soudan présente un potentiel archéologique intéressant, des déserts mystérieux et une vallée du Nil encore intacte, notamment dans sa partie septentrionale.
Si les infrastructures hôtelières deviennent vite rudimentaires à mesure que l’on s’éloigne de la capitale Khartoum, le voyageur pourra compter sur l’étonnante hospitalité du peuple soudanais. Notons d’ailleurs que de nombreux touristes étrangers profitent du couchsurfing, qui jouit d’une belle notoriété auprès des jeunes soudanais.
Un séjour au Soudan est peu enclin à la planification. Vous serez sans cesse amené à improviser, dans la mesure où il n’existe aucune carte fiable qui retrace avec précision le réseau routier, à fortiori lorsque l’on sait que de nombreuses voies bitumées ont été construites durant les 5 dernières années. Des vacances au Soudan vous mèneront forcément au Musée National de Khartoum, aux Pyramides Meroe, à la rue du Nil, à l’Île Tuti ou encore au Parc National de Sanganeb.
Découvrir la Mauritanie
A l’instar de la Libye, la Banque Mondiale ne dispose pas de chiffres officiels sur le nombre d’arrivées touristiques en Mauritanie pour les dernières années. Un séjour en Mauritanie sera un véritable challenge ; le pays est considéré comme étant coupé du monde à bien des égards.
Géographiquement désertique, politiquement volatile et économiquement pauvre, la Mauritanie n’est pas le premier pays qui nous vient à l’esprit lorsqu’il s’agit de séjourner en Afrique. En réalité, il n’est ni le second, ni même le dixième. Comme toutes les contrées peu fréquentées, la Mauritanie dispose tout de même d’un potentiel respectable qui n’est malheureusement pas exploité. Entre bijoux traditionnels et thé à la menthe sous la tente, le ministère du Tourisme multiplie aujourd’hui les stands dans les manifestations dédiées à la promotion des destinations mondiales, et œuvre pour donner une image colorée de ce pays largement ignoré par les touristes occidentaux.
La Mauritanie dispose d’une côte de 600 km sur l’océan Atlantique, qui s’étire de Ndiago au sud à Nouadhibou au Nord. Cette étendue maritime est jonchée de plages sauvages souvent désertes et dénuées de toutes commodités, ce qui en limite drastiquement la fréquentation. Nouakchott est l’une des capitales les plus récentes au monde. C’est un passage obligé pour les visiteurs étrangers, qui pourront visiter ses deux marchés et sa plage que l’on dit « peu sûre ». Votre séjour en Mauritanie sera également l’occasion d’apprécier des parties de pêche avec les locaux à Nouadhibou, à quelques mètres du Sahara occidental administré par le Maroc.
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